Les risques du « sharenting », l’exposition des enfants par leurs parents sur Internet, ciblés à l’Assemblée


Taper « family » dans la barre de recherche de réseaux sociaux suffit pour trouver des centaines de comptes publics dédiés à la narration des quotidiens familiaux : depuis 2016, un couple de trentenaire documente sa vie de globe-trotteur avec ses trois enfants sur YouTube, entre présentation de chambres d’enfant, partage d’expériences de voyage en famille ou encore vidéos consacrées aux anniversaires. Sur TikTok, une famille bretonne cartonne avec la mise en scène de son enfant de 3 ans dit « Tchouni », un blondinet qui fait l’unanimité lorsqu’il prépare des cafés, cuisine ou joue aux cartes avec son papa. Plus de 900 000 internautes suivent son quotidien sur la plate-forme, et plus de 300 000 à scruter la vie de la famille sur Instagram.

Cette tendance à publier sur les réseaux sociaux des images de ses enfants a un nom : le sharenting, contraction de deux mots anglais sharing (partager) et parenting (parentalité). Pour Bruno Studer, député Renaissance du Bas-Rhin, ce phénomène constitue surtout un des principaux risques d’atteinte à la vie privée des mineurs. Pour garantir le respect du droit à l’image des enfants, l’élu a déposé une proposition de loi, mi-janvier. Le texte sera examiné lundi 6 mars à l’Assemblée nationale, en première lecture.

« Ce sont des photos qui peuvent être l’objet de mésusages de type pédopornographique, ou donner lieu à du harcèlement dans le cadre scolaire », explique Bruno Studer. Les parents perdent le contrôle sur la diffusion de leurs images. La proposition de loi rappelle que 50 % des photographies qui s’échangent sur les forums pédopornographiques avaient été initialement publiées par les parents sur leurs réseaux sociaux.

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« Les deux premiers articles viennent placer la protection de la vie privée comme étant une des missions des parents en tant que détenteurs de l’autorité parentale pour l’exercice de laquelle ils doivent associer évidemment l’enfant », explique le député, qui se défend d’une loi répressive. L’article 4 est la mesure phare de la proposition de loi : « Dans les cas les plus extrêmes, on prévoit que le juge aux affaires familiales puisse confier à un tiers l’exercice du droit à l’image des enfants », ajoute Bruno Studer, membre de la délégation aux droits des enfants, créée en septembre 2022.

Canulars aux dépens de l’enfant

Convaincu que ce sujet est au cœur des enjeux de notre époque, M. Studer en a fait un de ses combats. Sans prétendre apporter une réponse miracle à ces pratiques, mais avec l’ambition d’alerter les parents. « Quand on fait une proposition de loi, c’est aussi pour mettre un sujet en débat », affirme le député, ancien enseignant d’histoire-géographie et d’éducation civique, qui fut dans ce cadre spectateur de la place que prend Internet dans le quotidien des adolescents. Le parlementaire était déjà à l’initiative de la loi sur les enfants influenceurs adoptée en 2020, première étape dans cette volonté de réguler l’exploitation de l’image des enfants en ligne. L’objectif était de protéger les activités rémunératrices des mineurs sur des plates-formes comme YouTube, Instagram, TikTok ou encore Twitch.

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Catégorie article Politique

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